mercredi 25 mars 2015

Review : Lobster Johnson - La Main Enflammée (Delcourt)

Vous le savez puisque je l'ai clamé ici même un nombre incalculable de fois, les mots "pulp", "SF Rétro" ou "Steampunk" ont pour moi un effet comparable au LSD. En effet, ils m'envoient dans un univers bariolé de couleurs criardes où se croisent toutes sortes de personnages et de situations vues et revues dans des agencements anachroniques qui tiennent toujours debout uniquement par la magie de cette littérature bon marché. Des nazis peuvent se faire dévorer par des dinosaures dans un jungle dissimulé sous les égouts de New York quand c'est du pulp. Un voyageur temporel peut se retrouver projeté en l'an 3025 et utiliser un Minitel pour comprendre ce qui lui est arrivé quand c'est la SF rétro. Un baron de la drogue asiatique peut utiliser un dirigeable pour lancer des robots de 10 mètres de haut sur Tokyo quand c'est steampunk. Tout est permis et c'est ça qui est jouissif.
 
Oh et c'est délicieusement kitsch aussi
Cependant, j'ai décidé de mettre ma passion de côté pour vous parler aujourd'hui du second tome des aventures de Lobster Johnson joliment intitulé La Main Enflammée et sorti chez Delcourt la semaine dernière. Pas d'envolée lyrique ou d'hystérie dans cette review pour une fois. L'analyse sera froide, logique et organisée.
 
Car quand la main est enflammée, l'esprit se doit de rester de glace
Commençons par la couverture. L'illustration se veut comme une référence directe à une esthétique réminiscente des années 30, de Fritz Lang et de certaines couvertures de Rocketeer ou de Fu Manchu. Le choix de l'éditeur parmi les différentes couvertures de The Burning Hand s'avère ici des plus judicieux car c'est de loin la plus belle, mais les autres - présentes entre chaque chapitre de l'album - sont tout de même excellentes bien qu'un cran en dessous.
 
Mais vraiment un cran quoi...
L'histoire quand à elle se résume en une succession de situations lambdas qu'on n'a vu dans de très nombreux films, épisodes de série, romans ou comics. Il serait d'ailleurs amusant de retracer les différentes influences du scénario.

- Dans le New York des années 30, un promoteur immobilier véreux veut racheter des terrains sur lesquels seront bâtis une autoroute. Elément de scénario lambda vu tant un million de films dont Miracle sur la 8ème Rue.


- Pour faire partir les gens, ils embauchent des gangsters qui vont s'enduire de peinture phosphorescente et se faire passer pour les fantômes d'une tribu indienne décidée à récupérer sa terre en assassinant les passants et en scalpant les policiers. Scalps meurtres mis à part, on est dans un épisode de Scooby-Doo.


- Lobster Johnson, mystérieux justicier aidé d'une équipe de choc intervient pour sauver la populace. Là, j'avoue que j'hésite entre la référence à Doc Savage ou à L'Agence tous Risques.


- Bien vite, une journaliste découvre l'existence du Homard et de sa bande. Vous avez dit Lois Lane ? Polly Perkins ? On est d'accord.
 
Anastasia Steele ? Elle était journaliste ?
- Ensembles, le héros et la journaliste intrépide vont se lancer à la poursuite du vilain qui va essayer de se débarrasser de ces empêcheurs de truander en rond. On pense au tandem Vicky Vale /Batman ou encore à l'association Gracie Law/Jack Burton dans Big Trouble in Little China.


- Pour se faire, le promoteur engage une medium asiatique qui contrôle un Allemand dont le corps est composé d'une flamme noire. J'avoue qu'ici je ne trouve pas vraiment de comparaison à faire...


Ajoutez à cela des cannibales vivants dans les égouts New-Yorkais, un nain fumeur et des relents de conspiration et vous obtenez un nouveau coup de maître de la part de Mike Mignola. Le papa de Hellboy enrichit à nouveau son univers en développant les aventures de Lobster Johnson qui - jusqu'à présent - n'avait été qu'un second rôle dans les aventures du démon aux cornes coupées.
 
Mais un second rôle qui avait la classe
A mi-chemin entre les aventures d'un Doc Savage et des planches du Shadow, l'auteur - secondé par John Arcudi, un autre habitué du Hellboy-verse - nous amène tous les éléments nécessaires à une bonne histoire pulp : une enquête policière, des méchants hauts en couleurs, du mysticisme et un héros aussi charismatique qu'il est mystérieux.


 Les dessins de Tonci Zonjic sont exactement ce qu'on attend d'eux pour ce type d'histoire. L'artiste derrière Qui est Jake Ellis ? nous livre un travail sobre et détaillé. L'album oscille entre des extérieurs grisâtres de ville plongée dans la révolution industrielle et des intérieurs souvent marqués par des jeux de lumière directement liés aux fusillades qui s'y déroulent.

Notez ici la force du rouge par rapport aux décors et personnages gris

In fine, Lobster Johnson - La Main Enflammée est un album de ces albums dont on regrette qu'il soit si court dans l'ambiance dans laquelle il plonge son lecteur est vraiment à contre-courant de la production actuelle. Bien entendu, il s'adresse en premier lieu aux fans de l'univers de Mike Mignola, mais à contrario d'un B.P.R.D ou d'un Abe Sapien, il arrive à se lire sans l'encombrante mythologie qui lui est lié. Un achat intéressant en somme.

 

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