lundi 20 juin 2016

Review : Veil (Delcourt)

Après une preview lors du FCBD 2016 qui nous présentait les 4 premières pages de l'album, Veil est arrivé au début de ce mois de juin pluvieux sur les étagères de nos libraires. Nouvelle série de Greg Rucka (beaucoup d'épisodes de Batman, Spider-Man et la série Lazarus) le court extrait découvert en mai m'avait - pour être honnête - laissé sur ma faim. Que faire maintenant que j'ai l'album entre les mains ?
Déjà, on peut faire une bonne blague !
Gardons notre réponse pour plus tard et intéressons nous tout d'abord à l'histoire. Une jeune femme s'éveille nue dans les sous-sols d'une grande ville jamais identifiée sans aucun souvenir de qui elle est, ni de ce qu'elle fait là. Suscitant un émoi particulier auprès de la gent masculine, elle sera recueillie par Dante, un jeune homme qui - bien que sensible aux charmes de la demoiselle - sera le seul à ne pas se jeter sur elle pour la posséder.


Grand bien lui en prend d'ailleurs tant le mystère autour de Veil s'épaissit au fur et à mesure que les cadavres s'amoncellent alors que des gens mal intentionnés tenteront de mettre la main sur elle. "tenteront" uniquement car la belle sait visiblement se défendre.


Mêlant ambiance de thriller urbain et magie noire, Veil arrive beaucoup trop tard pour moi ! Trop tard car le Fatale de Brubaker est déjà passé par là avec une intrigue quasi-similaire : une femme dont on ne sait rien mais qui attire tous les hommes est pourchassée par de sinistres individus qui veulent s'approprier son pouvoir. Vous repasserez pour l'originalité.
 
Vous avez un métro de retard les mecs !
De plus, là où Brubaker avait su délayer son intrigue pour nous réserver quelques surprises et un suspens de dingue, Rucka nous livre la clé de l'intrigue à mi-chemin de l'histoire (qui se compose de 5 chapitres). En résultent des thèmes à peine effleurés comme le libre arbitre où l'image de la femme dans l'esprit de certains hommes (si Veil se promène nue, c'est qu'elle est prête à coucher avec n'importe qui penseront les premiers hommes qu'elle croisera) et des personnages trop peu fouillés (pourquoi Dante résiste à son attirance ? qui est l'antagoniste principal ?) alors qu'il y avait effectivement du potentiel.


Si on ajoute à ça des enjeux bâclés et une conclusion qui laissera tout le monde sur sa faim, que reste-t-il pour sauver l'album ? Les planches de Toni Fejzula pardi ! Le dessinateur serbe nous offre des compositions organiques et des scènes d'horreur où les gerbes de sang viennent éclabousser des décors aux couleurs délavées. Un travail d'artiste à tous point de vue.


En conclusion, comme vous l'aurez compris, il m'est assez difficile de vous recommander Veil. La faute à un goût de "trop peu" semble marquer ses pages. Fatale explore tellement mieux le même sujet que vous dire que les deux œuvres se valent ne serait que pure mensonge de ma part... et je suis loin d'être un menteur.

 

vendredi 10 juin 2016

VO-Day : Wacky Raceland #1 (DC)

Certaines histoires ressemblent à des blagues, des canulars élaborés pour tromper la crédulité du premier gogo venu. Quand j'ai appris que DC allait publier plusieurs séries adaptées des cartoons de Hanna & Barbera, je me suis dit que ça ressemblait un peu à la fusion Marvel-Disney en un peu plus cheap... Puis les premières couvertures sont apparues et là, j'ai cru que j'étais victime d'un hoax : Scooby-Doo en pleine apocalypse mutante ? Les Fous du Volant dans un univers à la Mad Max ? J'ai regardé le calendrier le plus proche... Nous n'étions pas le premier avril. Par les saints costumes de Luq Hamet ! Cela pouvait-il être vrai ?
 
Car Luq Hamet animait Hanna Barbera Dingue Dong... P...n je suis vieux...
J'ai ma réponse aujourd'hui alors que le premier numéro de Wacky Raceland me regarde toujours d'un oeil malicieux depuis la table basse où je l'ai posé il y a quelques minutes avec l'air de me dire "Je t'ai bien eu !". Véritable réécriture adulte, violente, fun et décomplexée du dessin animé de mon enfance, ce comics flatte la part nostalgique en chacun de nous tout en prenant en compte que nous ne sommes plus des enfants et que l'on a plus forcément les mêmes goûts !



NDLR : Cette review a beau porter sur une issue en VO, F...K Shakespeare, j’appellerai les personnages par leurs noms français.

Le monde est en ruines ! Inondations, tornades, virus faisant muter la faune et la flore ainsi bien que la population ont ravagé le globe. C'est sur cette Terre troublé qu'une entité s'autoproclamant l'Annonceur arrache 10 personnes des griffes de la mort et leur propose un étrange marché. S'ils s'affrontent les uns les autres dans une série de courses mortelles, le vainqueur pourra rejoindre Utopia, le dernier havre de paix au coeur de l'apocalypse.



Pénélope Beauregard, Pierre de Beau-Fixe, les Frères Tête-Dur et d'autres se lancent alors dans la compétition au travers de paysages désolés où la nature ne leur fera pas de cadeaux. Constamment en danger, les concurrents devront également se méfier des manigances du fourbe Satanas, accompagné de Diabolo son chien cyborg.


Concept aussi improbable que jouissif, Wacky Raceland saura contenter à la fois les fans du cartoon original que les aficionados de films de SF tendance La Course à la Mort de l'An 2000. Avec un ton bien plus adulte que ce à quoi on aurait pu s'attendre, le scénario de Ken Pontac nous fait redécouvrir ces personnages qui ont troqué leur esprit bon enfant contre une noirceur qui, après coup, nous apparait comme une évidence. En plus de transformer la voix-off du cartoon (déjà adepte du brisage de 4ème mur) en divinité omnipotente, faire de Max le Rouge un nazi rêvant d'un nouveau reich ou du Professeur Maboulette un émule d'Herbert West sont autant de coups de génies décadents qui vous donneront un rictus de complicité.



(A noter que la série introduit un personnage trans en la personne du Sergent Grosse Pomme qui a troqué sa... pomme contre un abricot... ou un cosplay de Tank Girl, à vous de voir)
 
Je n'assume pas trop cette blague, mais en même temps la faire en VO était impossible
Il serait cependant prématuré de crier au génie trop vite. Si le concept est fun dans sa globalité, ce premier numéro met en place certains points de détails assez discutable. Donner une intelligence artificielle aux voitures qui, du coup, se plaignent ou aident leur chauffeur était - à mon humble avis - plus que dispensable.
 
Genre, un congrès de K-2000
De même, les dessins de Leonardo Manco, au demeurant sympathiques, sont parfois trop lisses. Certains personnages... Non... Satanas en fait... aurait gagné à avoir une véritable "trogne", un aspect plus ravagé, en accord avec le monde dans lequel ils évoluent.



En conclusion, je dirai qu'il faut laisser sa chance à ces Fous du Volant hardcores, badass et psychopathes. Parti comme une blague sur la ligne de départ, il sera intéressant de voir si la série va réussir à distancer ce statut quand elle commencera à monter dans les tours et arrivera peut-être en championne sur la ligne d'arrivée. Une affaire à suivre donc !

 

samedi 4 juin 2016

Review : Lady Mechanika (Glénat Comics)

Lady... When you're with me I'm smilin'
Give me... aaaaaaall your looooove !

Voilà la chanson qui se jouait dans ma tête lorsque l'annonce de la publication de Lady Mechanika chez Glénat est tombée. D'une part parce que cela me confirmait que Glénat continuait à nous faire découvrir des comics aussi originaux qu'inédits et d'autre part parce que cela allait enfin me permettre de vous faire part de mon amour pour l'esthétique Steampunk.


Réalisée quasiment entièrement par Joe Benitez (secondé de Peter Steigerwald aux couleurs), Lady Mechanika est en effet l'un des rares comic-books à traiter de cette branche de la Science-Fiction (d'autres exemples pouvant être la série Steampunk de Joe Kelly et Chris Bachalo ou certains elseworlds de Batman). Alors ne perdons pas une seconde de plus, graissons nos rouages, enfilons nos hauts de forme et que Dieu sauve la reine.


L'album regroupe les épisodes 0 à 5 de la série et met en scène notre héroïne dans deux aventures intrinsèquement liées. La première - sorte de prologue à la seconde - lance notre aventurière et enquêtrice aux trousses d'une créature possédant des membres de métal. Cette histoire permet de mettre en place l'héroïne aux bras mécaniques et la quête qu'elle mène pour savoir qui elle est, d'où elle vient, comment s'est elle retrouvée avec ses prothèses et des yeux rouges de démon tout en introduisant le sinistre Lord Blackpool, industriel peu scrupuleux à la tête d'une usine d'armement.


Le deuxième story-arc - bien plus conséquent - nous introduit davantage à l'univers de la série alors que Mechanika enquête sur l'apparition - et la mort - d'une jeune fille affublée elle aussi de bras mécaniques. Une enquête qui l'a mènera dans les caves du Ministère de la Santé et dans un camp de romanichels à la méfiance aussi aiguisée que leurs armes. Elle retrouvera sur son chemin d'anciens ennemis ainsi que le terrifiant Docteur Cain, fantôme d'une menace à venir.


Le monde de Lady Mechanika est absolument splendide. Version magnifiée d'une l'Angleterre Victorienne sur laquelle planent dirigeables et autres béhémoths aériens, on a envie d'en voir plus à chaque nouvelle page tournée. Le mérite en revient pour une grande partie aux dessins de Benitez qui a su capter l'essence d'un siècle passé. On a l'impression que les gravures qui peuplaient les pages du Strand à l'époque de Sherlock Holmes ou les romans de Jules Verne ont ici pris vie et couleurs.


Une ambiance particulière à la fois fantastique et nostalgique que l'auteur arrive à retranscrire dans tous ses décors et ses personnages. Personnages dont émergent bien sur la sublime et intrigante Mechanika, aussi belle en robe à froufrous que rebelle en pantalon et combinaison de chasse.


Il ne faut pas croire cependant que le reste du cast ne sert que de faire-valoir à la belle. Les personnages secondaires ont tous le droit à leur moment de gloire ou d'introspection. La flamboyance de la longue chevelure rousse du Commandant Winter n'a d'égal que le mystère qui entoure sa relation passée avec notre héroïne. De même, Lewis le mécanicien évite le cliché de l'homme blessé ayant sombré dans l'alcoolisme dans une scène touchante qui vous prendra par surprise.


Une fois n'est pas coutume, j'aimerai également parler des dialogues. Bien qu'il soit difficile d'en juger quand on a affaire à une VF, il me semble que le matériau d'origine - et à fortiori sa traduction - est également l'un des points forts de Lady Mechanika. Pour preuve : en feuilletant le volume en attendant mon tour à la caisse de la librairie, j'ai vu des bulles de dialogues de partout ! Cependant - bien que ma première réaction fut de m'attendre à quelque chose de verbeux - tout est passé avec fluidité et plaisir qui me fait dire (et ça sera là notre conclusion) :
Honey tes pages sont sucrées
Comme le nectar, douce Lady
Un album suave qui me met en extase
Mechanika mon coeur s'embrase...


PS : Rendez vous en octobre pour le tome 2