dimanche 3 juillet 2016

Review : Planetary Volume 1 (Urban Comics)

Warren Ellis démonte ! 

Cette introduction - qui pourrait juste passer pour le cri primaire d'un fanboy au vocabulaire peu fourni - est en fait les prémices d'une analyse bien plus profonde. En effet, il suffit de jeter un oeil à la bibliographie de l'auteur britannique pour se rendre compte qu'il a consacré énormément de temps à la déconstruction de nombreux mythes. Wolfskin s'attaquait à la dark fantasy, Desolation Jones aux mondes de l'espionnage, Doktor Sleepless aux histoires de savants fous et à la science-fiction et son tryptique No Hero - Black Summer - Supergod démembrait le mythe du super-héros sous toutes les coutures. Véritable érudit de la pop culture, Ellis a choisi d'utiliser ses connaissances pour nous révéler l'envers du décor des légendes qui ont balisé le monde des fictions modernes avec, souvent, pertes et fracas.


Dans cette optique, Planetary représente un aboutissement car la série de 24 épisodes (et quelques spécials et autres one-shots) repose sur la multiplication de ce concept. Là où les comic-books cités un peu plus haut ne s'attardaient chacun que sur un seul mythe en particulier, ce sont ici des décennies de pop culture qui passent à la moulinette.


Planetary c'est l'histoire d'une organisation mystérieuse et d'une équipe d'archéologues de l'histoire secrète du monde. Cette équipe composé de la pulpeuse et costaude Jakita Wagner, du technopathe nommé Le Batteur et d'Elijah Snow, un "enfant du siècle" (une personne née le 1er janvier 1900 et au rythme de vieillissement différent du commun des mortels comme on en trouve plusieurs dans l'univers Wildstorm) capable de manipuler l'humidité dans l'air pour produire de la glace est envoyé sur différents sites pour cartographier les rencontres entre le monde réel et les univers de fiction.


Et là, tout y passe. De la littérature pulp type Doc Savage, aux films de monstres nippons en passant par les histoires de fantômes et de créatures Lovecraftiennes, le monde révélé par Planetary tient sur ce simple concept : et si toutes les fictions, tout ce que l'homme a imaginé, écrit, dessiné ou porté à l'écran, était vrai ? Nos héros sillonnent alors le globe pour référencer toutes ses chimères venues à la vie avec tout ce que cela implique. Si Godzilla peut paraître majestueux de destruction lorsqu'il ravage Tokyo, son cadavre en décomposition perd le "glamour" que son statut fictionnel pouvait lui conférer.


Du coup, les pages des 14 épisodes qui constituent le volume sont remplies à craquer de références méta (un super-héros se questionne sur les changements dans sa vie... alors qu'ils ne sont que les choix du scénaristes) et autres caricatures d'une centaine de mythes modernes et autres légendes urbaines. Une connaissance quasi encyclopédique devra alors être l'apanage du lecteur pour saisir tous les clins d'oeil qu'Ellis nous adresse. 


Rien que le one-shot clôturant ce volume et mettant en scène la rencontre entre l'équipe et différentes versions de Batman vous demandera de connaitre sur le bout des doigts les nombreuses phases - tant artistiques que psychologiques - que le justicier de Gotham a traversé depuis sa création.


Niveau dessins, John Cassaday réussit à donner vie à ce patchwork d'idées revisitées en alternant, lui aussi, les emprunts tant dans le design de certains personnages (Doc Brass ou le jumeau quasi parfait de Doc Savage) que dans les ambiances de ses planches qui passent du style psyché 70's aux films de gangsters made in Hong Kong.


En résumé, je ne me sens pas capable de conseiller Planetary à qui chercherait une histoire de super-héros cool et décomplexée. Warren Ellis tend plutôt ici à offrir un nouveau point de vue sur une culture littéraire et cinématographique à des fans érudits gavés à la série B et aux romans de gare. Une excellente lecture en somme, mais pas pour n'importe qui.
 

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