samedi 16 janvier 2016

Review : Providence (Panini Comics - Fusion)

Cinq ans après l'excellent Neonomicon, Alan Moore est à nouveau rejoint par Jacen Burrows et ses crayons pour une maxi-série ambitieuse inspirée une nouvelle fois par l'ombre de H.P Lovecraft. Quand on connait la passion du barbu de Northampton pour la magie, l'étrange et l'occulte, on ne peut que se dire que l'oeuvre dont il va accoucher va être épique, protéiforme et dantesque dans ses références... Providence, dont le premier tome vient de sortir en France alors que la publication américaine est toujours en cours, comble toutes ces attentes !



L'histoire est celle d'un voyage... celui de Robert Black, jeune reporter New-yorkais dans l'Amérique de 1919 qui cache à son entourage le fait qu'il soit juif et gay. Suite au suicide de son amant il rencontre un occultiste qui lui parle d'un pays à l'intérieur de son pays. Une société dans la société qui donne à Robert l'envie de plaquer son boulot et de recueillir des témoignages dans l'Amérique profonde dans le but d'écrire un livre.
 
Pourquoi un seul personnage fait de la buée quand il parle ?
Un livre qui rend fou, un trio de vieux bonhommes faisant le commerce de flacons mystérieux, un fermier qui a fait un enfant à sa fille pour donner corps à une créature nommé le Rédempteur... Robert sombre de plus en plus dans une horreur indicible tout en passant toujours à côté. Candide, l'apprenti écrivain ne verra jamais les aspects les plus terrifiants de son odyssée ou les considérera comme de simples hallucinations, même quand sa propre vie sera en danger.
 
Ou la dignité d'une jeune paysanne
Profondément ancrée dans l'oeuvre de Lovecraft, Providence (d'ailleurs le titre est une référence à la ville de Providence, Rhode Island où Lovecraft naquit et fut enterré) balade donc son héros dans les décors qui ont inspiré le maître américain de l'horreur. Connaître la bibliographie du père du mythique Cthulhu devient alors un pré-requis pour quiconque voudrait saisir le comics dans son entièreté.



Ainsi, le Docteur Alvarez - qu'une étrange maladie oblige à vivre dans un appartement réfrigéré - est l'équivalent Mooresque du Docteur Munoz de la nouvelle Cold Air. De même, le détective Tom Malone qui apparait au début du deuxième chapitre n'est autre que l'un des personnages de The Horror at Red Hook.



Si l'on peut penser que l'intrigue reste simpliste - le protagoniste passant d'une ville à une autre pour interviewer une personne qui va le mener à la prochaine étape de son voyage - posséder les références dont Moore jalonne son récit permet de saisir la véritable note d'intention de la série : rendre un hommage vibrant et complet à l'une des figures emblématiques de la littérature fantastique.
 
Et je clos la boucle sur Alvarez / Munoz
Si le travail d'Alan Moore a été avant tout un travail de recherches, Jacen Burrows fournit quant à lui des planches au découpage très cinématographique. Beaucoup de cases sont allongées sur toute la largeur de la page, dans un espèce de format assez cinémascope. L'action, ou du moins l'élément important de chaque case, se situe ainsi au milieu de l'image, s'offrant ainsi pleinement au regard du lecteur.



Le dessinateur nous offre également certains gimmicks intéressants comme ses flashbacks sépia qui nous dissimulent constamment l'identité d'un des personnages présents dans les diverses scènes. Pas particulièrement fan de son rendu des visages humains, que je trouve trop lisses, son sens de la mise en scène a fini par me faire complètement oublier ce désagrément.



En résumé... On ne crache jamais sur un nouvel opus d'Alan Moore et Providence nous rappelle de la plus belle des manières que le grand barbu a encore beaucoup d'histoires à nous raconter et de sagesse à partager avec nous.

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire